Vermiglio ou La Mariée des montagnes de Maura Delpero
Pendant l’hiver 1944, dans un village isolé du Nord de l’Italie, l’arrivée d’un soldat bouleverse une famille dont il séduit la fille. Jusqu’au moment où ce séduisant inconnu se voit rattrapé par son passé. Remarquée pour son premier film de fiction, Maternal, la réalisatrice Maura Delpero se positionne comme une héritière de Rossellini et d’Olmi par son attachement à une certaine permanence des sentiments. Sur un thème de pur mélodrame, elle dresse le portrait de groupe d’une communauté rurale repliée sur elle-même et préservée ainsi du bruit et de la fureur du monde, loin de la Seconde Guerre mondiale qui s’achève. Dès lors, le débarquement d’un inconnu au beau milieu de ce lieu où le temps s’est arrêté résonne comme un choc des cultures sinon une révolution des mœurs. C’est tout l’intérêt de cette étude de caractères extrêmement subtile de confronter deux univers en observant leur interaction et les dommages irrémédiables que va engendrer cette irruption d’un prince charmant venu d’ailleurs en sonnant le glas de l’innocence et de la pureté. Issue du documentaire, la réalisatrice observe cette histoire en s’attachant au moindre détail pour montrer comment ses protagonistes perdent progressivement une partie de l’innocence qui les a toujours protégés. Un changement de paradigme qui passe par un éloge de la pureté, mais évite la mièvrerie parfois inhérente à un tel parti pris. Maura Delpero applique au féminisme sous-jacent un traitement dépourvu d’anachronisme, tout en reprenant à son compte une longue tradition du cinéma transalpin.
Jean-Philippe Guerand
Vermiglio. Film italo-franco-belge de Maura Delpero (2024), avec Giuseppe de Domenico, Martina Scrinzi, Tommaso Ragno, Roberta Rovelli. 1h59.