Publié le 31 janvier, 2023 | par @avscci
0Vaincre ou Mourir de Vincent Mottez et Paul Mignot
On ne peut pas dire que Vaincre ou Mourir nous ait convaincu. Il serait dans ces conditions facile de détourner la tête et de passer à autre chose. Mais le film n’est pas anodin, et c’est peu dire…
Formellement d’abord… C’est un film historique. Qui n’a pas à rougir de ses décors et costumes, ni même de la chorégraphie de ses batailles, particulièrement nombreuses en l’état. En revanche nous font grincer des dents les scènes oniriques qui ponctuent le film, d’un ridicule achevé. Et surtout le prologue au cours duquel trois historiens (dont on se doute qu’ils ont été choisis sur des critères purement idéologiques) à la mine particulièrement sinistre viennent nous expliquer ce qu’il va falloir penser de l’histoire qui nous sera narrée.
L’histoire de la rébellion vendéenne et royaliste pendant la Révolution de 1789, qui a donné lieu à quelques bains de sang dont personne ne peut s’enorgueillir. Il est clair que la Révolution n’a pas présenté en Vendée son meilleur visage et que les massacres de Nantes font incontestablement partie de ses pages noires. Il serait malheureux que certains sujets soient glissés sous le tapis sous prétexte qu’ils dérangent. Il y a eu des guerres civiles (régionalement limitées) en France et l’épisode cathare n’est pas plus glorieux que les massacres de la Saint-Barthélemy ou les dragonnades de Louvois contre les Camisards. Mais il faut être sérieux… Vaincre ou Mourir se veut didactique, tournant le dos au romanesque de Chouans (de Philippe de Broca, qui visiblement rêvait de faire un Autant en emporte le vent à la française), tout en se permettant une ellipse temporelle béante qui efface tous les enjeux de la période. Et les troupes révolutionnaires deviennent une horde de huns qui déboulent à l’improviste, ivres du sang des insurgés. Le personnage central est ici Charette, le chef des Vendéens, dont le film décrit l’engagement, frileux au début pour devenir obsessionnel à la fin. Il ne manque pas de panache, les réalisateurs ne reculant devant aucun superlatif, parvenant même à montrer ses derniers instants (il est fait prisonnier et fusillé) comme une nouvelle Passion du Christ…
Rien de cela n’est innocent évidemment. Il faut bien voir que la maison de production du film n’est autre que le Puy du Fou, Vaincre ou Mourir n’étant que le premier élément d’une floppée de films (que l’on n’attend pas donnant dans la nuance) imaginée par les proches de Philippe de Villiers (qui a fait de son spectacle historico-révisionniste un triomphe, transformant sa Vendée natale en un nouveau Disneyland à droite toute. Ce n’est pas le lieu de disserter sur le parcours politique de ce chantre de la France catho éternelle, pote de Zemmour et de Buisson. Que l’on nous permette néanmoins de ne pas faire semblant de ne pas remarquer que sous couvert de reconstitution historique, c’est bien un courant qui méprise la République et encense la réaction la plus brutale qui coule sous nos yeux. Beurk.
Yves Alion
Film français de Vincent Mottez et Paul Mignot (2022), avec Hugo Becker, Rod Paradot, Gilles Cohen, Jean-Hugues Anglade. 1h40.