Un métier sérieux de Thomas Lilti

Un métier sérieux Thomas Lilti a le mérite d’avoir ressuscité le genre faussement simple de la grande comédie populaire. Derrière son passé de médecin, passé qui a traversé toutes ses œuvres précédentes (films et séries), on a pu perdre de vue l’essentiel : la maîtrise de la narration ou de la caractérisation, même avec des intrigues à multiples protagonistes, l’assurance du rythme, du dosage entre drame et légèreté, de la distribution toujours impeccable (avec l’indispensable mélange entre acteurs confirmés et nouvelles têtes). Un métier sérieux a l’immense mérite de se jouer (enfin) en dehors du cercle de la médecine. Non que l’on s’en lassait, mais il était temps d’envisager Lilti en dehors de cette piste professionnelle autobiographique parfois un peu grosse (une pensée pour Olivier Marchal…) Ce nouveau film se concentre sur une autre profession, celle de professeur, et permet ainsi d’appréhender enfin ce qui était pourtant évident : Lilti a toujours filmé le travail, ses groupes, ses habitudes, ses petites joies et même ses tragédies. En acceptant de se déplacer dans un milieu qu’il connaît moins, il ne perd pas ses repères et retrouve donc la même recette derrière Hippocrate. Lilti est toujours maître des équilibres : une pincée de social, de l’émotion et du comique, enrobé par de solides prestations d’acteurs. On peut trouver cela un peu programmatique, mais notre homme semble appartenir à la catégorie des artisans, plus intéressé par l’équilibre des ingrédients, la finition, que par la radicalité du geste. Il en faut aussi, et tant qu’à faire autant qu’ils aient le talent de ce dernier.

Pierre-Simon Gutman

Film français de Thomas Lilti (2023), avec Vincent Lacoste, François Cluzet, Adèle Exarchopoulos, Louise Bourgoin. 1h41.