Critique

Publié le 26 octobre, 2024 | par @avscci

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Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde de Emanuel Pârvu

La fin du monde, c’est la fin des terres émergées et le début de la mer pour la population du petit village du Delta du Danube où se déroule le troisième long métrage du cinéaste roumain Emanuel Pârvu. C’est aussi ce qui semble frapper de plein fouet son personnage principal, le jeune Adi, lorsque ses parents découvrent fortuitement son homosexualité et décident de l’aider à “guérir”. Pensé comme un récit d’épouvante psychologique froid mais oppressant, le film observe la manière dont le piège se referme sur son héros qui est à la fois menacé de l’extérieur (il subit une violente agression physique à cause de son orientation sexuelle) et de l’intérieur, au sein même de la cellule familiale qui devrait être son refuge. Brutalisé, isolé de ses proches et même séquestré dans sa propre maison, il subit un calvaire feutré, tout en prétendue douceur, mais d’une violence évidemment décuplée, que le cinéaste filme à distance, dans une mise en scène posée et élégante qui privilégie la fixité des cadres et la composition recherchée des plans. Et puisque l’on est Roumanie, la religion et la corruption politique sont évidemment de la partie : la première prend fait et cause pour les parents, et propose une séance d’exorcisme pour ramener le jeune homme du côté de l’hétérosexualité ; la seconde permet d’étouffer tranquillement l’affaire. Dans cette société obscurantiste, seuls deux personnages féminins représentent finalement une lueur d’espoir, mais suffisent heureusement – preuve que les temps changent – à faire basculer le récit du côté de la raison.

Marie-Pauline Mollaret

Trei kilometri până la capătul lumii. Film roumain de Emanuel Pârvu (2024), avec Bogdan Dumitrache, Ciprian Chiujdea, Laura Vasiliu, Valeriu Andriuță, Ingrid Micu-Berescu. 1h45.




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