The Creator de Gareth Edwards

Voici un film qui tombe à pic, tant il aborde une problématique brûlante. L’action a beau se dérouler en 2065, personne ne peut être dupe. Los Angeles arbore un Ground Zero qui est la cicatrice mémorielle de la catastrophe qui l’a dévastée en lieu et place du fameux Big One prédit par les sismologues. Loin de là, en Asie, l’intelligence artificielle a pris le pouvoir avec l’aval des autorités et menace de coloniser le reste du monde. Reste à identifier l’entité mystérieuse qui la commande… À une époque où le cinéma de science-fiction imaginatif a cédé le pouvoir aux super-héros et aux grandes sagas à but lucratif dont le réalisateur britannique Gareth Edwards a lui-même tâté avec Godzilla (2014) et Rogue One : A Star Wars Story (2016), The Creator témoigne d’une ambition peu commune et d’une ironie cinglante, au moment même où les scénaristes et les comédiens américains disputent un bras de fer avec les Majors et les plateformes de streaming pour éviter que les humains ne soient évincés par l’intelligence artificielle. Le film affirme aussi par son titre une dimension mystique à travers son couple principal qui associe un homme afro-américain à une IA féminine asiatique. Avec dans le rôle principal John David Washington dont on n’a pas oublié la composition dans Tenet de Christopher Nolan. Reste à savoir maintenant quel sera l’accueil réservé à ce film fourmillant dont la confrontation n’est pas sans évoquer aussi Avatar par son caractère prophétique assumé, la cause écologique étant remplacée ici par un enjeu civilisationnel plus sournois : l’intelligence artificielle.

Jean-Philippe Guerand

Film américano-britannique de Gareth Edwards (2023), avec John David Washington, Gemma Chan, Sturgill Simpson. 2h14.