Présence de Steven Soderbergh
Steven Soderbergh est un réalisateur connu pour son éclectisme. Il navigue entre les genres avec une aisance rare, passant du cinéma indépendant des années 90 avec Sexe, mensonges et vidéo, aux blockbusters des années 2000 avec la saga Ocean’s, jusqu’à des films visionnaires comme Contagion, qui anticipait une pandémie mondiale. Cette année, il s’attaque au film d’horreur avec une histoire de maison hantée, mais, fidèle à lui-même, il détourne les codes du genre pour proposer une approche singulière.
L’histoire suit la famille Payne : Rebecca et Chris, parents de Tyler, champion de natation, et de Chloé, une jeune fille tourmentée par le décès récent de sa meilleure amie. Lorsqu’ils emménagent dans une superbe maison, ils ignorent qu’elle est hantée par une Présence. Ce regard invisible devient notre point d’entrée dans l’intimité de cette famille, révélant peu à peu ses failles : les tensions entre les parents, l’isolement de Chloé face à une mère obsédée par la réussite de son fils, et un équilibre familial qui vacille. Seule Chloé semble percevoir cette entité qui l’observe et semble intriguée par elle. Le film s’installe alors dans un huis clos fascinant et anxiogène, où Soderbergh joue avec la perception du spectateur, le déroutant et le perdant au fil des scènes.
Présence est une œuvre cinématographique qui transcende les conventions du genre horrifique en offrant une exploration profonde des relations humaines et des thèmes du deuil et de la rédemption. Ce film est une expérience immersive et émotionnellement riche. L’originalité du film réside dans son point de vue entièrement subjectif, car l’histoire est racontée du regard d’une entité invisible. La caméra qui incarne cette Présence, observe les personnages sans jamais être vue. Soderbergh utilise une caméra en mouvement constant, avec de longs plans-séquence fluides. Grâce à des stabilisateurs et des drones, il donne l’impression d’une présence invisible qui flotte dans la maison. Ce choix renforce l’immersion et accentue la sensation d’un regard omniscient qui hante les lieux. L’absence de point de vue humain classique amène le film à utiliser le montage sonore pour suggérer la présence de l’entité. Des bruits discrets, des changements dans l’atmosphère sonore et des silences lourds ajoutent à l’ambiance mystérieuse.
Myriam Burloux
Presence. Film américain de Steven Soderbergh (2024), avec Lucy Liu, Chris Sullivan, Callina Liang, Eddy Maday, West Mulholland et Julia Fox. 1h25.