Critique

Publié le 17 décembre, 2024 | par @avscci

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Oh, Canada de Paul Schrader

Revenu à son meilleur depuis quelques années, Paul Schrader retrouve aujourd’hui un acteur dont il a contribué à faire une star, Richard Gere, l’inoubliable interprète d’American Gigolo (1980). Celui-ci incarne un ancien activiste américain réfugié au Canada pour échapper à la conscription qui relate son itinéraire chaotique au seuil de la mort. Un film à tiroirs sur les illusions perdues des soixante-huitards où c’est à Jacob Elordi révélé par Sofia Coppola dans Priscilla en Elvis Presley, que revient la tâche redoutable de camper ce personnage pendant sa jeunesse militante. Le film s’inspire d’un roman de Russell Banks, connu pour l’adaptation magistrale qu’a tiré Atom Egoyan de De beaux lendemains (1997), qui avait inspiré à Paul Schrader l’un de ses films les plus poignants, Affliction. Derrière son titre aux intonations de complainte, Oh, Canada propose une réflexion désenchantée sur l’idéalisme et le rêve brisé de ces activistes qui ont cru possible d’empêcher le monde occidental de courir à sa perte quand les illusions de toute une génération sont venues se fracasser contre l’engagement américain au Vietnam. Pour y avoir appartenu (il est né en 1946), Schrader s’identifie totalement aux illusions perdues de ce personnage fauché dans son élan que les circonstances ont contraint à revoir ses ambitions idéalistes en s’exilant. Le film met en perspective ses rêves brisés pour les faire résonner avec notre époque. Un propos audacieux aux allures testamentaires de la part d’un cinéaste éprouvé par la pandémie de Covid-19 qui travaille déjà à son prochain opus, Non compos mentis.

Jean-Philippe Guerand

Film américain de Paul Schrader (2024), avec Richard Gere, Uma Thurman, Jacob Elordi. 1h35.




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