Critique

Publié le 2 juillet, 2024 | par @avscci

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Napoléon d’Abel Gance

Et si, anticipant les palmarès de fin d’année, on affirmait que le meilleur film de 2024 est déjà sur les écrans ? On ne se tromperait peut-être pas de beaucoup. Un certain Abel Gance (1889-1981), se prenant à peu de choses près pour le bon Dieu, ou plus exactement pour certain petit caporal, le jeta sur les écrans au printemps 1927, après des années d’effort. Son Napoléon pouvait faire concurrence à Naissance d’une nation, Les Rapaces, Le Cuirassé Potemkine. L’histoire de la diffusion de ce monument est tout à fait chaotique. En 1927, il y eut une version de 3h47, puis une version de 9h30. Gance ressortit le film au cours des années dans des versions différentes, Coppola s’en est mêlé, comme Kevin Brownlow. Aujourd’hui, après 15 ans de travail colossal, la restauration dirigée par Georges Mourier, une version fidèle au projet le plus clairement exprimé par Gance, sort enfin. Elle dure 7h et c’est une expérience comme on en connaît très peu dans une vie de spectateur. L’inventivité, la modernité, l’audace, le drame, les palpitations de l’histoire, l’intimité des individus, tout est brassé dans ce récit qui s’arrête à la campagne d’Italie (1796). Alors que Gance pensait au départ raconter la vie de son héros jusqu’à Sainte-Hélène, ces sept heures ne couvrent donc que quelques années. C’est d’une beauté démentielle, d’une énergie à laquelle il est difficile de trouver l’équivalent dans toute l’histoire du cinéma. Et la conclusion, la dernière demi-heure, quand, comme par magie, l’écran carré triple de largeur, laisse au spectateur l’impression d’une apothéose.

René Marx

Film français d’Abel Gance (1927), avec Albert Dieudonné, Gina Manès, Nicolas Koline, Antonin Artaud, Annabella, Alexandre Koubitzky, Edmond Van Daële. 7h05.




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