Critique

Publié le 15 janvier, 2025 | par @avscci

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Mémoires d’un escargot de Adam Elliot

Depuis le merveilleux Mary and Max en 2009, Adam Elliot n’a rien perdu de sa capacité à raconter des histoires tragiques et désespérées avec un humour en apesanteur qui rend tout plus supportable. Tournant le dos aux tenants du positivisme béat et de la réussite à tout prix, il se fait le chantre de celles et ceux qui n’entrent dans aucune case, et aspirent à une vie qui leur ressemble, loin des carcans sociaux et idéologiques du moment. Des êtres que certains pourraient qualifier de marginaux ou de “losers” impénitents, et qui nous apparaissent juste comme de formidables Humains. Grace, hypersensible qui aime se réfugier dans la lecture et auprès des escargots – parce qu’ils ne la jugent pas ; Gilbert, son frère jumeau rêveur introverti qui cherche sa voie loin des modèles virilistes qu’on lui impose ; Pinky, vieille dame excentrique qui ne mâche pas ses mots et a appris à se moquer du regard des autres : on tombe littéralement amoureux des trois personnages dont Adam Elliot entremêle les destins (contrariés et souvent douloureux) dans un monde brutal et confondant de bêtise sur lequel il porte un regard éminemment critique. S’il joue parfois sur la corde (ultra) sensible, le cinéaste australien le fait avec tellement de pudeur, de fantaisie et d’intelligence qu’il nous propose une dentelle virtuose d’émotions et de sentiments, rehaussée par la force magnétique de l’animation en volume. C’est peut-être parce ces figurines de pâte-à-modeler nous regardent avec la plus absolue sincérité qu’on ressent si profondément tout ce qui les affecte.

Marie-Pauline Mollaret

Film d’animation australien de Adam Elliot (2024), avec les voix de Sarah Snook, Kodi Smit-McPhee, Eric Bana, Dominique Pinon, Nick Cave. 1h34.




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