Critique

Publié le 9 juillet, 2024 | par @avscci

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Les Gens d’à-côté d’André Téchiné

Depuis son deuxième long métrage, Souvenirs d’en France (1975), André Téchiné n’a de cesse d’explorer les confins de l’âme et d’étudier les conséquences des situations les plus extrêmes comme les plus anodines. Avec toujours ce plaisir partagé qui consiste à réunir des interprètes pour observer l’alchimie invisible qui va naître de leur rencontre. Il s’attache cette fois à l’histoire simple d’une fonctionnaire de la police technique et scientifique dont le compagnon s’est suicidé et qui se prend d’affection pour un jeune couple de voisins fraîchement installé, en nouant avec la mère et sa fille des relations intimes sur lesquels plane l’ombre d’un absent, le père, un activiste sous haute surveillance. Brillant directeur d’actrices, Téchiné réunit ici deux natures à son goût : Isabelle Huppert qu’il a dirigée à ses débuts dans Les Sœurs Brontë (1979) et Hafsia Herzi qui démontre rôle après rôle l’étendue impressionnante de son registre et sort de deux compositions aussi magistrales qu’ambiguës dans Le Ravissement et Borgo. Le cinéaste règle leur pas de deux avec sa virtuosité coutumière, en évitant tous les pièges du manichéisme frontal que pourrait susciter une telle confrontation. Les multiples questionnements des Gens d’à côté découlent d’un dilemme moral, avec pour le défendre des interprètes inspirés qui évoluent sur le registre des détails les plus intimes et les plus infimes. Sans être une de ses œuvres majeures, le film atteste de la maîtrise de Téchiné et sa prédilection assumée pour les zones d’ombre les plus obscures et les faux-semblants propices à l’ambiguïté.

Jean-Philippe Guerand

Film français d’André Téchiné (2024), avec Isabelle Huppert, Hafsia Herzi, Nahuel Pérez Biscayart, Romane Meunier. 1h25.




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