Le Déluge de Gianluca Jodice

Le Déluge est d’abord un film historique, puisqu’il nous montre la détention de la famille royale à la Prison du Temple en cette année 1792, dernière étape de son calvaire (Louis XVI sera décapité le 21 janvier de l’année suivante). Evidemment ce n’est pas un film de prison comme les autres, les gardiens sont plus nombreux que les détenus (qui ne sont pas des prisonniers ordinaires) et le décor est au départ grandiose. Mais ce qui est passionnant c’est de voir que ce chapitre de l’Histoire de France a l’aspect d’une peau de chagrin, les prisonniers voyant leurs prérogatives se réduire à vue d’œil, l’agressivité de certains gardiens devenant au contraire de plus en plus marquée. L’angoisse de l’enfermement est particulièrement bien dessinée, concernant le roi et les siens qui jamais n’auraient imaginé tomber si bas et dont la sidération est palpable. Mais jamais ils n’abandonnent ce qu’ils considèrent inhérent à leur rang, une certaine idée de la dignité (Guillaume Canet, dans la peau du roi, est particulièrement impressionnant). Ils gardent la tête haute (avant qu’elle ne roule dans la sciure). Flotte en permanence un sentiment d’incompréhension, de peur, alors que le froid saisit et que la mort rôde. Le spectateur est évidemment au cœur du drame, qui ne veut pas de mal aux prisonniers (le film ne fait pas leur procès) et compatit à leur triste sort. Une expérience sensorielle autant qu’une leçon d’histoire…

Yves Alion

Film franco-italien de Gianluca Jodice (2024), avec Guillaume Canet, Mélanie Laurent, Aurore Broutin. 1h41.