La Plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius

Les réalisateurs traditionnels sont de plus en plus nombreux à effectuer des incursions vers le cinéma d’animation dont les possibilités techniques et graphiques infinies facilitent la concrétisation de certains projets. C’était assurément le choix idéal pour porter à l’écran le conte de Jean-Claude Grumberg. Au cœur d’une forêt polonaise, un bûcheron et son épouse vivent coupés du monde. Jusqu’au jour où la femme recueille un bébé tombé (ou jeté) d’un train de déportés qu’elle entreprend d’élever comme si c’était le sien, sans rien en dire à son époux. Le bambin prend rapidement une place de choix dans ce couple, le mari lui témoignant même malgré lui la tendresse d’un père… Michel Hazanavicius s’est approprié cette histoire simple en dessinant lui-même les visages de ses protagonistes comme des eaux-fortes au fusain façon Chagall. Le réalisateur de The Artist signe sans doute ainsi son film le plus personnel en s’adressant à un public de tous âges, ce qui est rarement le cas des films qui traitent de la Shoah. Il s’appuie en outre pour cela sur un casting vocal de haute volée, du narrateur que Jean-Louis Trintignant a campé quelques semaines avant sa disparition au bûcheron représenté par Grégory Gadebois (en rem placement de l’indésirable Gérard Depardieu) et à son épouse qu’incarne Dominique Blanc. Ce film simple et déchirant atteint à une justesse universelle par la sim plicité avec laquelle il aborde la pire des tragédies à travers le prisme de la bienveillance et de l’humanité.

Jean-Philippe Guerand

Film d’animation belgo français de Michel Hazanavicius (2024), avec les voix de Jean-Louis Trintignant, Grégory Gadebois, Dominique Blanc. 1h21.