Publié le 30 janvier, 2025 | par @avscci
0La Pie voleuse de Robert Guédiguian
Plus que chez tout autre cinéaste, nous retrouvons chez Robert Guédiguian quelques repères immuables, les décors, les comédiens, et même les personnages… Nous n’étions pas retournés dans son quartier d’enfance et de cœur, l’Estaque, depuis Les Neiges du Kilimandjaro. Mais nous y retournons à chaque fois avec un plaisir immense, comme si l’on rendait visite à des gens de notre famille (que nous aimons). Robert Guédiguian a il est vrai, un talent rare pour faire vivre ses personnages, auxquels nous nous attachons d’autant plus volontiers qu’il les aime, quelles que soient leur faiblesses (et même leurs impardonnables défauts dans certains films, mais pas ici). C’est la vie qui passe, cela pourrait être banal, c’est tout simplement magnifique. Parce que sans tambours ni trompette notre homme (et ses comédiens) nous parlent de l’essentiel, de ce qui nous touche au cœur, la façon dont on aime, dont on s’attache, dont on se détache, dont on boucle les fins de mois aussi… Il est arrivé à Robert Guédiguian de tout voir en noir (La ville est tranquille, pour ne citer que le plus désespéré de ses films, au demeurant remarquable). Que ses derniers films irradient de cette bienveillance que portent les personnages non seulement ne nous gêne pas (nous ne sommes quand même pas au pays des Bisounours), mais nous gonfle le cœur. A cet égard, la scène au cours de laquelle le personnage de Jean-Pierre Darroussin reprend Les Pauvres Gens, le poème de Victor Hugo qui avait déjà servi de prétexte aux Neiges du Kilimandjaro, fera couler les yeux les plus rétifs aux débordements. La Pie voleuse fait partie d’un ensemble, celui des « films de l’Estaque », une chronique du quartier -qui a néanmoins un caractère universel- entamée il y a 43 ans avec Dernier Eté. Mais il peut évidemment se voir sans rien connaître des autres films de son auteur, et le déguster comme une sucrerie (le film le proclame : il n’y a pas de mal à se faire du bien), une sucrerie de notre enfance. La Pie qui chante ?
Yves Alion
Film français de Robert Guédiguian (2024), avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Robinson Stévenin, Marilou Aussilloux. 1h41.