Critique

Publié le 17 décembre, 2024 | par @avscci

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Everybody Loves Touda de Nabil Ayouch

Nabil Ayouch incarne depuis ses débuts le renouveau d’un cinéma marocain ambitieux qui traite de l’intolérance et de l’évolution des mœurs, sans jamais perdre de vue son sens du spectacle. Avec une prédilection pour les héroïnes d’aujourd’hui qui passe par des œuvres aussi engagées que Mektoub (1997) et Much Loved (2015). Pour la troisième fois de sa carrière, il aborde dans Everybody Loves Touda la libération de la femme à travers une émancipation artistique qui vient du corps. Après la danse dans Whatever Lola Wants (2007) et le hip-hop dans Haut et fort (2021), ce réalisateur souvent inquiété, voire menacé pour son progressisme s’attache à une coutume ancestrale que perpétue une jeune mère célibataire partie de sa province avec son petit garçon sourd- muet pour tenter sa chance à Casablanca et devenir une artiste traditionnelle marocaine en perpétuant l’Aïta, un cri devenu chant. Comme souvent dans le cinéma de Nabil Ayouch, le véritable pouvoir appartient à ces dames qui ont fort à faire pour se défendre de l’emprise des mâles conditionnés par leurs pulsions naturelles et un ordre hiérarchique plutôt rétrograde à l’ère de #MeToo. Everybody Loves Touda est en ce sens indissociable de son interprète principale, Nisrin Erradi, dirigée par Yasmine Benkiran il y a quelques mois en prisonnière en cavale dans le road movie Reines. La morale du film apparaît toutefois plutôt désenchantée et interpelle directement la société marocaine figée dans un ordre social de plus en plus déconnecté des réalités du monde qui l’entoure. Un message sans ambiguïtés, mais pas sans nuances.

Jean-Philippe Guerand

Film franco-marocain de Nabil Ayouch (2024), avec Nisrin Erradi, Joud Chamihy, Jalila Tlemsi, El Moustafa Boutankite. 1h42.




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