Publié le 9 juin, 2017 | par @avscci
0Le Vénérable W. de Barbet Schroeder
Avec Général Idi Amin Dada (1974), puis L’Avocat de la terreur (2007), Barbet Schroeder avait esquissé une Trilogie du Mal que Le Vénérable W. vient achever aujourd’hui en tentant de répondre à une question qui obsède ce réalisateur attiré par le bouddhisme depuis l’âge de vingt ans. Il y aborde des faits tragiques survenus en Birmanie où des moines se sont radicalisés, à l’instigation du mouvement 969 dirigé par l’extrémiste Ashin Wirathu, au point de prôner l’éradication de la minorité musulmane des Rohingyas, dénoncée comme un crime contre l’humanité par l’ONU… le 4 avril 2017. Ce que recherche le cinéaste dans ce pays paradoxal qui a surmonté la dictature pour porter au pouvoir une lauréate du Prix Nobel de la Paix en la personne d’Aung San Suu Kyi, ce sont les racines du mal, à travers des préceptes religieux dévoyés par des fanatiques qui ont exploité l’emprise qu’ils exerçaient sur leurs ouailles pour les endoctriner dans une idéologie fasciste. La puissance du film réside dans le fait que Barbet Schroeder mêle des images de propagande glanées sur les réseaux sociaux et destinées initialement à susciter un soulèvement meurtrier avec celles qu’il a lui-même tournées dans une quasi clandestinité. Il émane de ce Vénérable W. diabolique un pouvoir de fascination qui le désigne comme la figure de proue impassible d’une organisation criminelle capable d’exploiter les ressources d’Internet pour parvenir à ses fins en gardant les mains propres. Même Goebbels n’y avait pas pensé.
Jean-Philippe Guerand
Film documentaire franco-suisse de Barbet Schroeder (2016), avec la voix de Bulle Ogier. 1h 37.
Critique en partenariat avec l’ESRA.