Publié le 27 novembre, 2019 | par @avscci
0Noura rêve de Hinde Boujemaa
Premier long métrage de fiction d’une cinéaste belgo-tunisienne déjà expérimentée, Noura rêve confirme la vitalité du cinéma tunisien. Le film vient de recevoir début novembre 2019 le Tanit d’Or des Journées Cinématographiques de Carthage. Fondé en 1966, ce festival est le plus grand d’Afrique avec le Fespaco de Ouagadougou. Raja Amari, Leyla Bouzid, Mohammed Ben Attia, Kawther Ben Hania, Ala Eddine Slim sont des exemples de cette nouvelle génération, courageuse, militante, où les réalisatrices sont nombreuses, c’est un point essentiel. Souvent la présence de coproducteurs français contribue à la réalisation de ces films. Ceci montre à quel point les attaques répétées contre le système français de financement du cinéma sont non seulement stupides, faites par des ignorants, mais menacent réellement l’activité cinématographique dans des dizaines de pays du monde. Pour son film, Hinde Boujemaa bénéficie de la présence pour le premier rôle d’une star, Hend Sabri, couronnée elle aussi à Carthage. Elle incarne une femme modeste qui souhaite divorcer de son mari criminel et détenu. Une femme qui affronte une législation rétrograde punissant l’adultère sévèrement (jusqu’à cinq ans de prison). Le film, inspiré d’un travail documentaire en profondeur, est mené en fait comme un thriller, tenant le spectateur de bout en bout. Hend Sabri est à contre-emploi et renonce à toute sophistication pour mettre son talent au service du récit, comme l’humoriste Lotfi Abdelli, ici particulièrement inquiétant. Cette vitalité du cinéma tunisien se déploie sous la menace, chacun le sait bien, de tout ce qui tire en arrière, tout ce qui cherche à écraser les femmes comme les hommes. Leur liberté d’aller et venir, de choisir leur vie. Cette menace, nous aurions intérêt à ne pas croire de ce côté-ci de la Méditerranée qu’elle ne vient que d’une seule catégorie d’obscurantistes. Le combat est global.
René Marx
Film franco-belgo-tunisien de Hinde Boujemaa (2019), avec Hend Sabri, Lotfi Abdelli, Hakim Boulasaoudi. 1h32