Publié le 19 novembre, 2018 | par @avscci
0Mon cher enfant de Mohamed Ben Attia
Ferid Boughedir, Raja Amari, Leyla Bouzid, Moufida Tlatli, les années passent et le cinéma tunisien, trop rare sur nos écrans, nous apporte régulièrement des trésors de raffinement formel, d’intensité émotionnelle. Très bien reçu à Berlin en 2016 pour son premier long, Hedi, un vent de liberté, Mohamed Ben Attia, né en 1976, surprend à nouveau avec Mon cher enfant. Le film commence comme un drame familial, la préoccupation naturelle de parents face à un adolescent à la santé fragile. Sans révéler quoi que ce soit, on peut faire l’éloge du basculement scénaristique qui fait passer ce problème individuel à un questionnement politique et historique passionnant. D’autant plus que la politique ne fait jamais oublier les sentiments et le désarroi individuel à Ben Attia. Le garçon est fils unique. Son personnage et celui de sa mère sont traités en profondeur. Mais le véritable héros, c’est le père. Le récit l’entraîne dans un double voyage, un itinéraire intérieur et un parcours réel qui le mène très loin de son petit appartement tunisois, de ses soucis d’argent, de ses anxiétés quotidiennes de citadin modeste dans un pays en difficulté économique. Film sur les sentiments, Mon cher enfant ne cède jamais au mélodrame, au pathos. Film politique et historique, il ne cède pas non plus au didactisme, aux solutions faciles. Ben Attia regarde en face la cruauté de notre temps, la fragilité et la force des humains ordinaires débordés par un monde en crise. Il campe des personnages jamais superficiels (pensons à la collègue confidente du père). Il n’y a évidemment aucun exotisme dans tout cela. Les angoisses de Riadh (magnifique interprétation de Mohamed Dhrif) sont les nôtres.
Film franco-belgo-tunisien de Mohamed Ben Attia (2018), avec Mohamed Dhrif, Mouna Mejri, Zakaria Ben Ayed. 1h40
Critique en partenariat avec l’ESRA.