Publié le 18 décembre, 2018 | par @avscci
0Maya de Mia Hansen-Løve
Mia Hansen-Løve n’est jamais tout à fait là où on l’attend. Dans sa carrière, un film chasse l’autre, sans qu’il soit toujours possible d’y percevoir un fil rouge solide. No man’s land entre L’Avenir (2016) et Bergman Island (2019), Maya résonne d’ailleurs en écho à sa propre situation d’artiste en proie au doute. Ce film de chambre à ciel ouvert s’attache à un reporter de guerre éprouvé par sa captivité en Syrie qui part se ressourcer en Inde, y rencontre une femme avec laquelle il entrevoit un autre avenir possible, mais se heurte à sa nature profonde. Quitte à passer à côté de sa vie. Il est bel et bien question de rédemption et de renaissance dans cet opus contemplatif qui a l’audace de prendre son temps et de sacrifier son intrigue à son atmosphère. Comme si la réalisatrice avait décidé elle aussi de se laisser porter par cette Inde qui incarna pour les soixante-huitards un havre d’évasion et de reconstruction. Fils aîné de Marie Trintignant et du batteur de Téléphone, Roman Kolinka n’a nul besoin de mots pour crever l’écran et nous entraîner dans son errance. C’est ce qu’a compris la réalisatrice en le choisissant. Son beau visage ressemble à une page blanche sur laquelle elle projette tous ses fantasmes, sans chercher à nous imposer de direction claire. On y lit un fort désir d’introspection qui n’est pas sans évoquer celui de Jack Nicholson dans Profession : reporter (1975) de Michelangelo Antonioni. Moralité : il faut parfois savoir se perdre pour mieux se retrouver.
Jean-Philippe Guerand
Film français de Mia Hansen-Løve (2018), avec Roman Kolinka, Aarshi Banerjee, Alex Descas. 1h45.
Critique en partenariat avec l’ESRA.