La Croisade de Louis Garrel

La solastalgie, anxiété liée aux enjeux environnementaux, s’invite de plus en plus dans les œuvres de fiction, qui tentent de mettre en images cette angoisse touchant les jeunes générations, peut-être plus sensibles que leurs aînées aux conséquences du dérèglement climatique et de l’extinction des espèces. De retour derrière et devant la caméra, Louis Garrel s’empare du sujet avec un mélange d’humour et de bonne foi, imaginant un couple dépassé par l’engagement écologique de leur pré-ado de fils. Le récit fonctionne lorsqu’il démontre l’urgence de l’action, et qu’il lui apporte une nuance d’espoir : mobilisée, la jeunesse mondiale a les moyens de relever le défi, et de proposer des solutions qui échappent aux adultes. L’idée n’est pas neuve (ensemble, tout est possible), mais elle fait du bien à entendre. On est en revanche moins convaincu lorsque le réalisateur s’entête à tirer le film vers le registre de la farce outrée et antinaturaliste, venant sans cesse parasiter les enjeux universels (rien de moins que la sauvegarde de la planète, donc) par d’autres totalement insignifiants et rebattus, tels que l’éveil sentimental du jeune garçon, ou les dissensions qui surviennent entre ses parents. Comme si le film devait absolument remettre en perspective les convictions écologiques du jeune héros, et renvoyer aux calendes grecques la recherche de vraies solutions. D’où l’impression désagréable qu’il n’ose pas aller au bout de son propos, bifurquant vers une vision au fond assez désuète de l’éculé “fossé des générations”, et diluant maladroitement ce qui faisait son principal intérêt.

Marie-Pauline Mollaret

Film français de Louis Garrel (2021), avec Louis Garrel, Laetitia Casta, Joseph Engel. 1h07