L’homme fidèle de Louis Garrel

Deuxième long métrage de Louis Garrel, après le très réussi Les deux amis (2014), L’homme fidèle a été écrit avec Jean-Claude Carrière, le scénariste in assoluto du cinéma français depuis soixante ans. Voisin de palier ou presque du metteur en scène-comédien dans le cœur de Paris, là où Renoir, Truffaut et compagnie ont rêvé longtemps, Carrière a pris sa proposition marivaudesque pour y ajouter du Hitchcock et du Keaton. Un homme repris par un ancien amour jamais vraiment oublié, un enfant au père indéfini, un meurtre improbable, une trop jolie fille-adolescente-femme fatale, le dispositif est excitant et Garrel s’en sort plutôt très bien. Agréable et élégant, le film est bref et c’est une qualité. Pas de graisse, pas de bavardage, faire court est un art. Le personnage de Garrel, Abel, est hésitant à souhait. La Marianne de Casta (coucou Marivaux ?), femme de tête et mystérieuse. Ève, c’est Depp, obsédée et inconstante. Il y a aussi un Sherlock Holmes pré-ado (Joseph Engel) pour catapulter toute banalité scénaristique. On se plaindra pourtant : Garrel ouvre souvent des portes sur l’étrange, le loufoque et les referme trop vite. On aurait aimé plus de folie, une folie dont on le sent capable. Osera-t-on dire aussi que Garrel, Casta et Depp sont trop beaux, qu’il fallait des visages ordinaires pour convaincre davantage ? Non, on n’osera pas.

René Marx

Film français de Louis Garrel (2018), avec Louis Garrel, Laetitia Casta, Lily-Rose Depp, Joseph Engel. 1h14.