Critique

Publié le 17 décembre, 2024 | par @avscci

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Une langue universelle de Matthew Rankin

Puisque “nous sommes perdus à tout jamais en ce monde” comme le souligne un des personnages d’Une langue universelle, autant le faire avec classe et élégance. Telle semble en tout cas la devise de Matthew Rankin qui creuse depuis une douzaine d’années déjà le sillon d’une cinématographie libérée de tous les carcans formels et narratifs qui embarrassent tant de jeunes cinéastes. Son deuxième long métrage s’y attelle même avec gourmandise en nous entraînant dans une étonnante quête filiale et existentielle au cœur de la ville de Winnipeg, où pour une raison inconnue, tout le monde parle persan. On y croise un homme (incarné par le réalisateur lui-même, en cousin pas si éloigné de Buster Keaton) qui revient dans sa ville natale pour retrouver sa mère malade qu’il a trop longtemps délaissée, des enfants qui ont leur propre mission à accomplir, un guide touristique, et bien d’autres personnages formant une galerie mi-comique, mi- absurde, sur lesquels repose ce drôle de conte doux-amer. Si, dans un premier temps, l’ironie et les ressorts de la comédie burlesque font du film une comédie lunaire (dans laquelle on n’hésite pas à observer 30 minutes de silence devant un monument au bord d’une voie rapide, ou à vanter les différents camaïeux de gris des bâtiments), la dernière partie laisse subrepticement la place à une émotion qui nous serre le cœur. Dans les deux cas, ce sont la poésie, l’humanisme et la fantaisie qui guident la caméra du cinéaste, lui permettant d’atteindre ce niveau de virtuosité émotionnelle.

Marie-Pauline Mollaret

Universal Language. Film canadien de Matthew Rankin (2024), avec Rojina Esmaeili, Saba Vahedyousefi, Mani Soleymanlou, Matthew Rankin, Pirouz Nemati. 1h29.




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