Critique

Publié le 14 novembre, 2024 | par @avscci

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Une part manquante de Guillaume Senez

Nos batailles avait signalé une rencontre, celle d’un cinéaste et d’un acteur, Guillaume Senez et Romain Duris. L’évidence de leur collaboration ne pouvait s’arrêter là et, effectivement, ils se retrouvent dès le film suivant de l’auteur, Une part manquante. Mais le terrain peut-être légèrement familier, pour le cinéaste, de leur premier film commun (réalisme social, terreau ouvrier, à la fois privé et politique) fait ici place à une terre volontairement éloignée, et pas forcément accueillante. C’est au Japon que se situe le récit, centré autour d’un cuisiner devenu chauffeur, qui vit depuis des années à Tokyo en espérant pouvoir retrouver sa fille, séparée de lui par les lois extrêmement restrictives concernant la garde parentale. Une situation qui semble désespérée jusqu’à ce que, par un hasard total, sa fille rentre un jour dans son taxi. C’est l’histoire de ce rapprochement, de ces retrouvailles avec la pièce manquante donc, que conte le long métrage. Le pathos, le sentimentalisme digne d’un vieux téléfilm du dimanche, avec en prime un sujet sociétal porteur (la garde parentale est un sujet épineux au Japon) pourraient être là, mais le résultat échappe à tous ces pièges qui semblaient pourtant inévitables. Senez construit son film ses acteurs, Duris autant que Judith Chemla, et fait de leur souffrance, de leur égarement, le bloc central de l’œuvre, échappant à tout didactisme ou toute leçon trop facile. Le regard ne juge jamais, ne prend pas de recul, il scrute et fait corps avec ses comédiens, sur la difficulté de vivre avec un gouffre béant dans sa vie.

Pierre-Simon Gutman

Film franco-belge de Guillaume Senez avec Romain Duris, Judith Chemla, Mei Cirne-Masuki. 1h38.




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