Critique

Publié le 14 novembre, 2024 | par @avscci

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Se souvenir d’une ville de Jean-Gabriel Périot

On avait remarqué Jean-Gabriel Périot dès son premier long métrage documentaire, Une jeunesse allemande, en 2015, une chronique originale de l’itinéraire de la bande à Baader. C’était un montage savant de documents d’archives, replaçant cette histoire dans la longue période de l’après-guerre en Allemagne de l’Ouest, montage lourd de sens et construit sans commentaire. En 2022, il adaptait un livre de Didier Eribon pour Retour à Reims (Fragments) et il parvenait à embrasser en 1h23 une grande partie de l’histoire de la classe ouvrière française. Ce nouveau film est un témoignage puissant sur la mémoire de Sarajevo. Des jeunes gens d’il y a trente ans, étudiants en cinéma ou banals amateurs, ont filmé quotidiennement les angoisses et les horreurs des quatre ans du siège le plus long de notre histoire récente. Images atroces, sans filtre, prise depuis l’abîme. Périot, muni d’une simple tablette, revient en Bosnie et montre ces bandes aux jeunes gens devenus quinquagénaires. Il les filme, simplement et résolument, regardant leurs propres images, les commentant, revenant sur les événements, les émotions, survivants pleurant leurs morts et leur jeunesse dévastée. C’est un rappel sur les violences inouïes de ce temps-là, une réflexion profonde sur ce que sont les images, une lamentation sur le temps cent fois perdu. Périot continue avec persévérance un travail de fond qui nous bouscule, qui nous éveille.

René Marx

Film documentaire français de Jean-Gabriel Périot (2022). 1h49.




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