Critique

Publié le 3 octobre, 2024 | par @avscci

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Joker, folie à deux de Todd Philips

Avec Joker (2019), Todd Philips a inventé une alternative radicale à la vogue des super-héros, en s’attachant à la genèse d’un tueur psychopathe qui deviendra plus tard l’ennemi juré de Batman. Sa suite s’attache à la détention et au procès de ce triste sire qui devient l’idole d’Harley Quinn. Le film joue la carte du réalisme sinon du naturalisme le plus noir et s’en remet pour cela à la personnalité hors du commun de son interprète principal, Joaquin Phoenix au sommet de son art, humanisé ici par sa complicité avec Lady Gaga. L’habileté de Todd Philips consiste à jouer de repères issus de la saga de DC Comics et familiers de ses fans, tout en brisant le moule et en les recyclant à sa façon sur un registre d’une noirceur extrême. Avec toutefois ici une composante supplémentaire qui inscrit le film dans la grande tradition hollywoodienne à travers son hommage appuyé à la comédie musicale et quelques somptueux morceaux d’anthologie sous le signe de Tous en scène. Comme si ce couple uni par sa marginalité se réfugiait dans ses rêves artificiels en Technicolor pour échapper à une réalité sordide et notamment à ces décors popularisés par le septième art que sont une prison et un tribunal. Poussé à réaliser cette suite par Joaquin Phoenix et le succès considérable de l’opus originel (plus d’un milliard de dollars de recette planétaire), Todd Philips pratique en quelque sorte la politique de la terre brûlée, luxe suprême qui consiste à rendre toute suite théoriquement impossible. Cette Folie à deux manifeste en tout cas une audace souvent sidérante et toujours débordante d’inventivité.

Jean-Philippe Guerand

Film américain de Todd Philips (2024), avec Joaquin Phoenix, Lady Gaga, Brendan Gleeson, Catherine Keener 2h18.




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