Une affaire de principe d’Antoine Raimbault

En 2012, José Bové, alors député européen, s’inquiète du limogeage d’un commissaire à la santé éloigné de ses propres idées politiques. Affaire de principe : la démocratie exige que les règles du droit soient respectées. Ou bien tout le système sera menacé. Peu importe si la victime n’est pas de votre bord. Bové sent que ce limogeage cache des manipulations gravissimes, découvre que les lobbies du tabac sont derrière l’affaire. Pour transformer ce combat qui a duré des années en un thriller politique, Raimbault a dû franchir plusieurs obstacles : la complexité des institutions européennes, pas franchement cinégéniques, et le risque d’un « thriller de bureau ». Le côté chien fou du personnage de Bové permet au spectateur de se passionner pour cette étrange enquête : bien loin des technocrates qu’il côtoie, c’est un habitué des marges et des vraies audaces militantes. Des plateaux du Larzac aux démontages de fast-food, il a appris à n’avoir peur de rien, à poursuivre obstinément ses objectifs pourvu qu’ils coïncident avec ses convictions. Bouli Lanners, maverick du cinéma, joue le rôle du maverick de la politique. Lui associant deux complices précieux (VDB et Brunnquell), lâchant ses trois héros de bande dessinée dans un décor tristounet illuminé par leur obstination et leur honnêteté, Raimbault réussit aussi bien son coup que ses personnages eux-mêmes.

René Marx

Film franco-belge d’Antoine Raimbault (2024) avec Bouli Lanners, Thomas VDB, Céleste Brunnquell. 1h35.