Critique – D’argent et de sang de Xavier Giannoli

Un film de Xavier Giannoli avec autant de stars et sur un tel sujet aurait été accueilli, avant par bien des salles de cinéma, mais désormais ce genre de projet s’épanouit sur ce que l’on appelait avant le streaming le petit écran. La différence réside dans la narration et le temps plus long. Giannoli prend effectivement son temps, dans le meilleur sens possible, pour conter la saga authentique de la taxe carbone, avec des noms changés qui ne trompent personne, tant les personnages et les actions du fait divers original sont reconnaissables. Le récit reconstitue la folle histoire de cette arnaque qui permit de détourner près de 300 millions d’euros de l’État français, transformant une belle idée écologiste en cauchemar. Si Ramzy Bedia est très bon dans son rôle d’escroc de Belleville, l’œuvre tourne clairement autour du duo antagoniste des personnages incarnés par Lindon et Schneider. L’un un enquêteur torturé obsédé par ses responsabilités, l’autre un trader héritier obsédé par lui-même. Les deux ont déserté leur famille, de manière fort différente, et les chassés croisés de ces personnalités opposées créent l’axe moral, ou humain, du récit. Giannoli ne tombe pas dans le piège d’une copie scorsesienne, la description de l’ascension et de l’opulence, car il semble moins fasciné par le processus que le délicat mécanisme humain, le trou dans l’âme ou le cœur, qui poussent les protagonistes vers l’accumulation, vers la chasse, vers des actions souvent destructrices. Le résultat est le portrait troublant de somnambules qui courent sans arrêt vers leur perte sans parvenir à s’arrêter. de son art.

Série française créé par Xavier Giannoli (2023), avec Vincent Lindon, Niels Schneider, Ramzy Bedia. 6 x 52 minutes (saison 1). Disponible sur Canal +

Pierre-Simon Gutman