Publié le 1 août, 2022 | par @avscci
0Un été comme ça de Denis Côté
Avant de devenir un cinéaste québécois de renommée internationale (ses films sont régulièrement présentés aux festivals de Berlin et de Locarno), Denis Côté fut un critique de cinéma émérite. Il quitte définitivement la plume pour la caméra en 2005 après la sortie de son premier long métrage, Les Etats nordiques. S’ensuivent des œuvres difficiles d’accès telles Nos vies privées (tournée en langue bulgare) ou Carcasses ayant pour cadre une casse automobile. Il nous faut attendre le début des années 2010 pour découvrir deux films touchant un public plus large : Curling (L’Avant-scène cinéma numéro 644) puis Vic + Flo ont vu un ours. Lors d’une récente avant-première parisienne d’Un été comme ça, Denis Côté s’étonnait que, depuis huit ans, les distributeurs français boudaient ses films… Pourtant, il suffit de visionner Ta peau si lisse, Répertoires des villes disparues, Wilcox et Hygiène sociale pour le comprendre…
Un été comme ça marque une rupture dans la démarche d’un créateur tournant vite et beaucoup (quatorze longs métrages en seize ans !). Fini le cinéma abscons, retour à la narration et aux sujets dignes d’intérêt. Son dernier opus est une fiction totalement fictive. Côté imagine un programme médico-universitaire dédié à des femmes considérées comme hypersexuées. Trois d’entre elles acceptent d’être enfermées dans une superbe maison au bord d’un lac pendant une partie de l’été, en compagnie de thérapeutes voulant les remettre « dans le droit chemin ». Pour un cinéaste homme, réaliser un film sur le désir féminin dans un pays où le mouvement féministe est puissant, relève d’une prise de risques maximum. Côté se sort remarquablement bien du piège qu’il s’est tendu à lui-même. Ses personnages sont attachants et les plus perdus ne sont pas ceux que l’on croit… Le choix et le jeu des comédiennes Larrissa Corriveau, Laure Giappiconi, Anne-Ratte Polle et surtout Aude Mathieu dont c’est la première apparition à l’écran, sont pour beaucoup dans cette réussite. Et le spectateur, homme ou femme, ne sort pas indemne…
Sylvain Garel
Film canadien de Denis Côté (2022), avec Larrissa Corriveau, Laure Giappiconi, Anne-Ratte Polle, Aude Mathieu. 2h17.